GRIS APPÉTIT. GRIS BESOINS VITAUX. LES CAMIONS RAPPROVISIONNENT LA VILLE PAR LE LONG CHEMIN BLANC CASSÉ QUI MÈNE JUSQUE ICI. L’ÉPICERIE EST TENUE PAR UNE VIEILLE HABITANTE DE GRIS, C'EST AVEC ELLE QU'ON FAIT AFFAIRE. A L’INTÉRIEUR, ON Y TROUVE TOUT ET SURTOUT N'IMPORTE QUOI, C'EST LE SEUL MAGASIN DE GRIS.

Des atomes à la dérive. Des riens. Ils sont quelques uns à s'y réfugier. Des graffs recouvrent les murs et forment d'immenses fresques. Des matelas à même le sol et des canapés défoncés. Le squatt est sous terre, sous la ville. Un monde dans un monde, des vies enfouies. Des ombres survivent là, fantômes de gosses trauma. Des sourires à l'agonie. Des cris mutiques. Ici plus qu'ailleurs l'enfer se vit.

Tu vois la sère-mi plus loin que le bout d'ta rue ? Un terrain vide, un terrain vague. Des gens qui passent, du temps à perdre. Des tas de pneus à l'abandon, l'herbe folle qui perce le goudron. Ce terrain est le carrefour de GRIS, un point central mais aussi le lieu le plus glauque. On sèche les cours pour venir jouer au ballon, on deal de la came pour se faire de l'argent de poche. On y pleure sa solitude et on y promène l'espoir.

le port et ses eaux gercées, polluées dans lesquelles on hésite à faire le grand plongeon. des vaguelettes rongent la coque de la péniche. elle est amarrée ici depuis des lustres. le temps n'en finit pas de poncer la structure de bois et peaufine son œuvre. les barques peuvent encore servir mais ce sont des radeaux de fortune vous n'irez pas bien loin avec. les écluses sont vides et ont leurs propres écosystèmes. le port, c'est le regard planté vers l'horizon incertain. La vie est un naufrage : ici on stagne ou on s'échoue.